Chapitre VII (Iruku)… La nuit était sombre, un léger nuage de brume se déposait lentement sur la petite ville d'Astrub.
Les marchands rangeaient leurs étales, les pious rentraient dans leurs nids et les Souffleurs éteignaient les lampadaires, disposés un peu partout.
Pendant ce temps, un adolescent avançait dans la ville, malgré le noir total qui régnait on pouvait le voir jonglant avec un kama dans sa main…
Après avoir emprunté d'innombrables ruelles, j'atteignais une décharge.
Mes yeux en fentes, voyaient parfaitement dans le noir, héritage de mon dieu, Ecaflip.
Je m'approchais d'une trappe et l'ouvrit.
Un long escalier descendait dans une salle éclairée par des torches disposés sur les quatre murs de la pièce.
Morak, un disciple de Iop était debout au centre d'une dizaines de gosses le regardant avec admiration.
Il est le chef de ces bambins, ils volent pour lui en échange d'un rien de nourriture.
Je m'assis aux côtés de mon ami, Sah'kéh, un jeune adolescent d'une quinzaine d'années, fervent disciple de Pandawa.
Le Iop nous regardait avec dédain.
« Vous n'êtes pas encore morts vous deux ?! Lança ce dernier.
Il ne m'aimait pas. Mais c'est le chef, donc on lui obéissait. Surtout quand on est comme moi. De taille normale, j'ai le poil orangé, sale, et en bataille. Plutôt maigrichon. Mais j'ai un truc qui plaît aux filles.
Le iop m'avait donc provoqué.
Je me relevais, sortis mon kama et le fixais de mes yeux gris acier, d'un regard bestial hérité de je ne sais où...
Il recula d’effroi.
« La prochaine fois que tu nous envoies en mission suicide, fais en sorte qu'on y reste pour de bon ! »
Je pris mon élan, et lui balançais mon kama avec toute la force que je possédais.
La pièce alla de ficher dans le mur, recouverte de sang.
Morak mis la main à sa joue, un liquide chaud et visqueux s'en écoulait lentement.
Les gamins restèrent pétrifiés, personne n'avait encore jamais osé défier le chef d'une telle façon !
Adossé à un mur, Sah'kéh me regardait un sourire malicieux aux lèvres.
« Iru', t'es allé trop loin là, tu va me le payer de ta vie ! »
Morak sortit son épée, une vielle lame recourbée trouvée dans la décharge.
Je me battais, moi, à mains nues.
C'était comme ça ma vie. Depuis… je ne me souviens pas. Quand on est orphelin et qu'on est seul, on a peu de chance de survivre. Alors on s'organise en bandes, des gamins des rues. Il y a le chef, les autres, les bandes qui nous piquent le territoire, alors on se bat ! C'est comme ça pour moi depuis toujours.
Les enfants s'écartèrent en criant.
Le Iop bondit sur moi, il abaissa son épée avec force.
J'esquivais en roulant sur le côté et lui assénais un violent coup de pied dans les côtes.
Il se plia de douleur en grognant.
J'en profitais pour le frapper d'un coup sur la nuque.
Il saisit ma main, me fit tomber d'une balayette et abattit sa lame avec force.
Je plaçais mes pieds sur son thorax et le repoussais avant qu'il ne me coupe en deux.
Il se releva, brandissant son épée au dessus de sa tête.
Je fonçais sur lui et projetais mes doigts tendus au niveau de son cœur.
Il eut un hoquet de surprise.
Un fin filet de sang jaillit de sa bouche.
Son épée tomba au sol.
Il s'agenouilla ne pouvant plus soutenir son poids.
Je retirais ma main.
Quatre griffes sortaient de mes doigts. Elles avaient donc poussées. J'avais quitté l'enfance.
Mais… pourquoi brillaient-elles ? Pourquoi ce halo rouge, irréel ? Pourquoi ces murmures..?
Elles se rétractèrent en un chuintement.
« Mais… Que… ? »
Toutes les personnes présentes dans la salle scrutaient le corps sans vie du Iop, y compris Sah'kéh.
« Espèce de monstre, tu l'as tué !
- Tu n'est qu'un démon, retourne pourrir aux côtés de Rushu !
- Salopard !
- Enfermons-le !
- Torturons-le !
- Tuons-le !
-Mangeons-le !
- OUAIS !
- Tous sur lui ! »
Les enfants coururent dans ma direction, je me retournais et grimpais l'escalier à toute allure.
Je sortis de la décharge au pas de course, ne jetant même pas un regard derrière moi, j'étais maintenant dans la rue principale d'Astrub.
Je courrais toujours, de grosses gouttes de sueur perlaient sur mon front.
Dans la course, je bousculais un homme qui marchait tranquillement.
Je me fis mal à l'épaule, mais je devais continuer de courir. J'allais repartir, mais l'homme se retourna, me saisit l'épaule d'une ferme poigne et fixa mon visage d'un air sévère.
« Alors toi, dit-il d'un ton glacé, tu tombes vraiment pas au bon mo... Mais… Ces… Ces yeux ! »
Les cris des enfants surgirent au loin.
« Pitié, laissez-moi partir ! le suppliai-je en essayant de me libérer de son étreinte.
L'homme encapuchonné réfléchit deux secondes, comme plongé dans ses pensées.
Et les autres qui se rapprochaient…
- Suis-moi ! »
Il attrapa mon bras, et soudain, je fus comme glacé. Comme si l'hiver s'était abattu sur mon corps. Nous nous mîmes à courir. Nous traversâmes le marché, la rue principale, sans que personne ne nous voit.
Invisibles…
L'homme emprunta une série de ruelles qui finit par nous conduire en dehors de la ville. Nous avions semés les sales gosses.
Il continua d'avancer encore quelque pas, puis nous arrivâmes à son campement.
Un feu crépitait lentement devant une tente. Une dragodinde pourpre était attachée plus loin.
L'homme s'assit près du feu, releva son Solomonk, et se tourna vers moi.
J'y découvris le visage d'un sram. Je fixais de mes fentes grises les creux qui servaient d'yeux aux disciple du dieu assassin, deux faibles flammes bleu y résidaient.
Après quelques minutes passées à observer les moindres détails de mon visage, les flammes se mirent à briller d'un nouvel éclat, projetant de fines étincelles bleues, presque invisibles.
Il sourit.
« Par chance, je t'ai enfin trouvé ! »
Chapitre VIII (Spiks)Enfin ! Après trois mois !
J'ai passé la majeure partie de ma vie à me dire que je pourrai être dans une meilleure situation, mais rien ne pourrai égaler le désespoir de ces trois derniers mois !
Après la mort de Solamar et mon "bannissement" du Temple de Sacrieur, j'ai vraiment cru que la malédiction de Syria était devenue réalité.
J'avais perdu beaucoup dans l'aventure que j'avais vécue, bien plus que si je n'y était pas allé. Oh, certes, j'aurai pu aller à Bonta, présenter le sabre et demander ma prime, mais il aurait fallut que je n'eu pas d'âme.
Après m'être reposé à l'auberge, j'ai décidé de retrouver le fils de Solamar. J'ai d'abord demandé aux orphelinats locaux. Pas trace du jeune Iruku. J'ai fouillé les bas-fonds d'Amakna, les champs, le village. Rien. J'ai décidé de remonter vers le Nord, vers Astrub : La ville idéale pour les aventuriers et les hors-la-loi. En chemin, j'étais tombé sur une bande de roublards du coin des tofus qui se prenaient pour des terreurs. Erreur. Ils sont morts. Arrivé à Astrub, je me suis adressé aux mercenaires, la milice de la ville. Ils m'ont répondu qu'ils avaient bien plus intéressant et lucratif à faire que de rechercher un gamin des rues. Furieux, je retournais vers mon campement, au Sud de la ville, maugréant contre le monde et les dieux. Et là je tombe sur lui !
Le hasard vaut mieux que les recherches on dirait.
« Assied-toi » lui dis-je.
Il s'assied sur une bûche, prêt du feu et de mon sac.
Je m'assied également, en face de lui, de l'autre côté du feu.
« Tu sais, tu peux remettre ma bourse dans mon sac. On apprend pas à un sram à voler. »
Il la remet.
« Eh bien, pas très bavard hein ?
- …
- Moi c'est Spiks.
- Moi c'est…
- Iruku. Je sais.
- Qu'est-ce que vous me voulez ?
- Moi ? Oh, rien. »
Je tirais un long objet emballé dans un tissu.
« Ton père en revanche…
- Mon père ? Me coupa-t-il en se levant. Mon père est un salaud ! Il m'a abandonné ! À l'orphelinat, avant que je ne m'échappe, ils ont dit qu'une femme était venue, enceinte, qu'elle avait accouché, donné un nom à son enfant et qu'elle était morte deux jours plus tard ! Morte ! Elle a finit dans la fausse commune ! Il l'a abandonné, et moi avec ! »
Il se tut, à bout de souffle. Je le fixais. Constatant mon absence de réaction, il se laissa tomber par terre, se recroquevilla sur lui et se mit à sangloter.
« Pardon », dit-il entre deux sanglots.
Je ne pu m'empêcher d'éprouver de la sympathie à l'égard du gamin. Il avait vécu à la dure, toujours. Jamais il n'avait connu une main amie, il avait toujours dut se battre, et cela se voyait.
Je ne répondis pas. Je dégainais le sabre. Dans un long chuintement cristallin, la lame apparue, toujours aussi rougeoyante, irréelle, mortelle. Il leva les yeux et les écarquilla.
Je mis debout et fis tournoyer l'arme dans ma main.
« C'est le sabre de ton père. Il m'a demandé de te trouver, pour te le remettre. C'était sa dernière volonté.
- Ça ne change rien ! lança-t-il d'un ton acide. Ce sabre ne fera pas revenir ma mère ! »
Je fus derrière lui en un instant et je lui murmurais d'une voix plus glacée que celle de mon dieu :
« Maintenant tu vas m'écouter ; tu as raison : ta mère est morte et elle ne reviendra pas. En revanche, moi, je sais que ton père ne t'as pas abandonné pour rien ! Il était pourchassé par Bonta, pour une sale affaire. Tu ne sais pas de quoi ils sont capable pour retrouver quelqu'un ! Tu ne sais pas ce qu'ils auraient pu te faire, à ta mère et à toi, pour qu'il se rende ! Moi je sais, et je trouve que tu peux t'estimer heureux ! J'ai deviné que son retour de Frigost, où il s'était réfugié, c'était pour vous retrouver, toi et ta mère ! Malgré le danger ! Malgré les obstacles ! Il est mort et c'était pour vous retrouver, pour t'élever ! La seule chose à laquelle il a pensé à sa mort, c'est toi ! Il n'était pas complètement le salaud auquel tu pense ! »
J'enfonçais le sabre dans le sol devant lui. Et disparaissais dans la tente.
Chapitre IX (Iruku)Les paroles de Spiks m'avaient abattues, je n'osais bouger, terrifié.
Des sueurs froides descendaient le long de mon front.
Comment avais-je pu dire une chose pareil ? Je ne le connaissait même pas ! Et il est mort sans que je puisses le connaître.
Des remords s’installèrent dans mon esprit.
Des larmes coulèrent sur mes joues.
Le Sabre devant moi arborait une aura rougeâtre.
Je le regardais fixement, tendais ma main comme hypnotisé.
J'en saisis le pommeau...
Spiks était plongé dans ses pensées.
Il observait la lune par une entaille dans la tente.
« AAAAAHHHHHHHH !
Le Sram se jeta hors de la tente.
Son attention fut attiré par une immense ombre qui se dressait à l'emplacement du sabre.
La chose se retourna, captant ainsi la lumière du feu.
Spiks recula d’effroi, des frissons traversaient son corps tout entier.
Pour la première fois de sa vie, un sentiment inconnu le prit d'assaut.
La Peur.
Non pas celle qui vous surprend, le temps d'un instant, la vrai peur, celle qui vous tétanise, celle qui fait trembler vos entrailles, celle qui restera à jamais gravé dans votre esprit...
Le monstre le regarda d'un regard gris acier.
« Iruku ?! Les seules paroles qu'il pu prononcer.
Mais, c'est impossible ! Ce ne peut pas être lui !
D'énormes griffes sortaient de mes doigts, des cornes barraient mon front, mon corps avait triplé de volume, des pics sortaient de partout me faisant office d'armure.
Une aura démoniaque se dégageait de mon corps mutilé.
Je tenait le Sabre de ma main droite.
Mon esprit était écrasé par une force inconnue, je ne contrôlais plus rien.
Je leva le poing et l'abattit d'une puissance phénoménale sur le pauvre Sram qui se voyait projeté dans les airs brisant une dizaine de troncs d'arbres au passage.
Spiks se releva vacillant.
Il m'observa, moi, le fils de son ami.
Un éclair de génie lui traversa l'esprit.
Un fin manteau invisible vint recouvrir le Sram.
Je restait immobile.
Écoutant le moindre bruit qui pourrait trahir la position de mon adversaire.
Soudain Spiks apparut, juste devant moi, flottant de les airs, son pied fouetta, un seul coup, décisif.
Le Sabre s'envola au loin et alla se ficher dans un arbre.
L'aura démoniaque s'évapora, mes griffes se rétractèrent, mes cornes disparurent et mes poils redevinrent souples et orangés.
A la place du monstre se dressait maintenant un jeune Ecaflip.
Je m'écroulai.
Le Sram s’accroupit à mes côtés et vérifia le battement de mon pouls.
Il fut soulagé de me savoir toujours en vie.
Spiks traîna mon corps inconscient dans la tente et veilla sur moi toute la nuit.
Je me réveillais seul, dans la tente, avec un affreux mal de crâne.
Je sortis dehors.
Les rayons du Soleil m'aveuglèrent par cette belle matinée.
Après m'être habitué à la luminosité ambiante, je cherchais Spiks des yeux.
Il se trouvait près de sa dragodinde, chargeant ses affaires dessus, le Sabre y était suspendu.
Il m'aperçut.
« Ah ! Tu es enfin réveillé !
- ...
- J'avais jamais vu quelqu'un dormir ainsi, tu as des ancêtres marmottes dans ta famille ? Plaisanta-t-il.
Il faut dire que t'as fais un sacré bordel hier...
- Je n'ai plus aucun souvenir d'hier, tu peut m'éclairer ?
- Plus aucun ?!
- Non, plus rien après que tu sois retourné dans la tente... »
Le Sram se remémora la soirée d'hier, soirée qui restera à jamais gravé dans son esprit...
Il s'assit sur un rondin de bois.
Je fis de même.
« Je vais te raconter. »
Spiks acheva son récit, plongé dans ses pensées.
J'étais abasourdis, c'était incroyable !
Le Sram se leva.
« Nous allons au temple Ecaflip, ce qui s'est passé hier est très étrange et je veux l'avis d'un expert. »
- Je peux te poser une question ?
- Hmm ?
- Ai-je le choix ?
Il réfléchit un instant.
- Non. »
Sur ces dernières paroles les nous grimpâmes sur la dragodinde et nous nous mîmes en route vers le Sud.
« Nous longerons la montagne des craqueleurs, il y a un passage facile entre le Château et le massif. Et j'ai quelque chose à te montrer. Lança Spiks perdu dans ses pensées.
- Quoi donc ?
- Tu le découvriras bien assez tôt... »
Je restais silencieux.
Nous atteignîmes les montagnes à la tombé de la nuit.
« Nous allons poser le camp aux pieds des montagnes, nous les longerons de jour. »
Nous installâmes la tente et allâmes nous coucher.
Le Sram vint me réveiller, cachant son visage, geste que j’appréciais : Se réveiller avec un crâne devant sois peut effrayer...
J'émergeais lentement de mon sommeil.
Nous chargeâmes la dragodinde et repartîmes.
La chevauché des montagnes s'avéra difficile, il fallait sans arrêt faire des détours car les parois étaient trop abruptes pour y grimper avec la monture.
Après quelques heures, nous atteignîmes enfin un plateau pour souffler un peu.
Nous mangeâmes un bout de pain et nous nous reposâmes tranquillement.
Spiks fixait une corniche qui se dressait dix mètres plus haut.
Un sourire éclatant vint éclairer son visage, une lueur nouvelle brillait dans ses yeux.
Il s'avança vers la paroi, crocheta une prise et commença l'ascension.
« Mais qu'est ce que tu fais ?! M'écriais-je.
- Viens, tu vas aimer ! »
Aimer, aimer, je ne vois pas le plaisir de grimper à dix mètres de haut pour s'écraser ensuite.
Mais une force invisible me poussait à y aller.
Je saisis une prise, pris appui et m'élevais lentement.
Spiks grimpait à mes côtés, prêt à intervenir à la moindre erreur de ma part.
Nous grimpâmes encore quelques mètres.
Je commençais à sentir des crampes dans mes avants-bras.
Je regardais le vide, une chute serait mortelle...
J'essayais de saisir des prises fiables et dur, qui ne céderaient pas sous mon poids.
J'en saisie une, elle me semblait bonne.
Là fut mon erreur...
Je pris appui dessus, la pierre se brisa, je basculais dans le vide, essayent vainement de m'accrocher à la paroi mais il était trop tard, je filais droit vers le sol où des pics acérés n'attendaient que de me transpercer.
Une pression s'appliqua sur mon poignet.
Je relevais la tête.
Le Sram était en train de me crier dessus, un regard furieux barrait son visage.
« Mais redresse toi bon sang, tu veux nous faire basculer ?! »
Tout c'était passé très vite : Spiks avait planté sa dague dans la roche et s'en était servit d'appui pour pouvoir me rattraper, il m'avait ensuite plaqué à la paroi pour que la gravité ne nous entraîne pas.
J'étais suspendu dans le vide, seul la main de Spiks m’empêchait de m’empaler sur le pics rocheux.
Je me ressaisi et crochetais la roche.
Le Sram soupira de soulagement.
« Bon aller, on continue !
Nous reprîmes l'ascension, Spiks jetant des coups d'œil sur d'éventuelles prise fragiles.
Je pris appui sur la pierre, soulevais mon poids et atterri au sommet, épuisé.
Je m'écroulais lourdement sur le sol.
Mes bars me faisaient atrocement mal, mes jambes étaient en bouillie et les paumes de mes main étaient presque à vif.
Spiks me rejoignit.
« Mais pourquoi m'as tu fais grimper jusque là haut ?! T'es dingue ? J'ai faillis crever !
Son sourire s'étira.
- Tourne toi. »
Je m’exécutais, mécontent.
Le spectacle qui se dressait devant moi m’ébahit.
Le plateau sur lequel nous nous trouvions surplombait toutes les montagnes aux alentours, nous étions au plus haut point du monde des douzes.
Le Soleil se couchait à l'horizon, barrant le ciel de magnifiques teintes violettes.
Un vol kwakers faisait du rase-mottes entre les montagnes basses.
L'un d'eux s'écrasa contre une paroi ce qui me fit éclater de rire.
Je relevais le regard vers la vue unique qui se dressait devant moi.
« Content d'être venu ? » Lança le Sram dont le sourire ne cessait de grandir.
Je ne pu répondre tellement j'étais muet d'ébahissement.
Des larmes coulèrent de mes yeux.
« C'est magnifique.
- Oui. »
Après le choc passé, nous redescendîmes la montagne.
Nous dressâmes le camp et allâmes nous coucher.
Le lendemain, nous reprîmes la route et, après une demi journée de marche arrivâmes sur un plateau rocheux.
Spiks s'avança au milieu, plongé dans ses pensées
Au sol, une marque de sang.
Je m'approchais.
« Ton père à été touché ici. Le cœur était malheureusement atteint… Nous l'avons transporté au temple Sacrieur, mais rien à faire, il est mort là bas... »
Je restais silencieux.
Un sentiment de tristesse et de remords s'installa en moi.
Spiks s'en aperçut.
« Je suis désolé, je n'ai rien pu faire pour sauver ton père.
- Tu as fait de ton mieux, et c'est le plus important.
- …
- Aller, reprenons la route. »
Nous grimpâmes tout deux sur la dragodinde et reprîmes le trajet.
En fin d'après-midi, le temple d'Ecaflip se dressait enfin devant nous...
Chapitre X (Spiks)Je n'étais jamais entré dans le Temple du Dieu Joueur. Enfin, jamais par la grande porte, de jour je veux dire. Le bâtiment était refait de frais : brillant comme une pièce neuve, au dessus du cours d'eau vif qui allait devenir la rivière Kawaï.
Le Temple écaflip est bâtit tout en bois. Dans les grandes salles, l'ambiance est calme, accueillante et lumineuse le jour, mais elles se transforment en véritables salles de tripot enfumées dès la nuit tombée. Grands joueurs, les écaflips se bâtissent des fortunes considérables avant de tout perdre à cause d'un As. Qu'à cela ne tiennent ! Ils recommencent, infatigables.
Je passais devant Iruku. Les gardes me posèrent quelques questions avant de me laisser entrer. Un sram dans un lieu de jeux, c'est dangereux. Dans la salle, je reconnu Amiya, fervente disciple d'écaflip. Nous avions été des amis, hmm, très proches il y a des années de ça. Puis j'étais partit à Bonta, des lettres s'étaient perdues, et je n'avais plus de nouvelles d'elle, ni elle de moi.
Après des retrouvailles joyeuses et chaleureuses, je lui demandais comment nous pouvions obtenir une audience avec le Maître du Temple. Elle me répondit qu'en échange d'un service elle s'en occuperait. J'acceptais. Elle partit.
« Alors ? demandais-je à Iruku.
- Quoi ?
- Comment tu trouves ton temple ?
- Grand, vide, et froid.
- T'as pas visité le Temple de Sram ! Ici, en comparaison, il fait chaud ! Pour l'animation, attend le soir ! »
La disciple d'Écaflip revint et nous dit que le Maître serai disponible le soir même.
« En attendant, je peux te faire visiter tous les lieux du Temple pendant que le petit restera assis » Me proposa-t-elle en souriant.
Je ris intérieurement en voyant le regard à la fois gêné et furieux d'Iruku, et déclinais l'offre. Elle repartit d'une démarche souple et pleine de grâce. Je la suivis des yeux.
« Nan mais t'as vu ça ? J'hallucine ! Je suis pas un bébé, non ?! fulmina Iruku.
- Aller, on va s'assoir là bas en attendant ! dis-je en riant. »
Nous nous assîmes au comptoir, et un écaflip ensommeillé vint nous offrir à boire. Nous passâmes le temps à jouer aux cartes. Non seulement j'avais une malchance incroyable, mais en plus Iruku avait régulièrement des As et autres cartes dans ce genre. C'est bien le disciple de son Dieu celui là !
Petit à petit, la salle s'était remplie de disciples d'Écaflip, et tous jouaient à des jeux de hasard en buvant différentes mixtures, dont certaines à faire vomir un pandawa ! Iruku voulu goûter à un "cocktail" couleur d'ambre, mais lorsqu'il vit les guêpes flottantes à l'intérieur il se découragea vite.
Un garde vint nous voir et nous annonça que le Grand Maître nous attendait. Je payais le patron du petit bar et suivi Iruku et le garde jusqu'à la Salle du Maître.
Il nous introduisit dans la salle et referma la porte derrière nous. Je fus sidéré par la richesse des décorations : des tapisseries, des dorures, des piliers de marbre et de jade… Alors que j'admirais le plafond, je sentis qu'Iruku me tirait sur le gant. Je baissais la tête et vit le Maître qui me regardait, avec un petit sourire. Il avait l'air assez vieux, et portait un genre de robe rouge et or. Je remarquai immédiatement sa musculature de guerrier et ses cicatrices au visage, ce qui laissait deviner qu'il avait vaillamment combattu dans le passé.
« Approchez, approchez… nous dit-il.
Nous obéîmes.
« Ah, vous savez que nous ne laissons pas entrer les étrangers ici d'ordinaire, uh ? me dit-il. Mais vous avez un protégé écaflip qui à apparemment besoin de conseils, uh ?
Pourquoi vouliez vous parler à un vieil écaflip, uh ?
- Maître, j'ai avec moi Iruku, un jeune disciple de votre Dieu, et… Il y a quelque chose qui nous pose grandement problème, avec… l'épée de son père.
- Uh ? Iruku… J'ai connu ta mère, Samina, tu sais… uh ? Ah, mais pas ton père ! Et elle a toujours refusé de dire, uh, qui il était. Mais elle est partie… plus de nouvelles, uh. Et donc, pour quelle chose êtes-vous venus ?
- Pour cette raison ! dit le jeune écaflip.
Il sortit ses griffes. Elle rougeoyaient. Le vieil écaflip recula. Je sortis l'épée qui siffla. Elle rougeoyait elle aussi. Iruku, comme hypnotisé voulu la saisir. Je l'en empêchais. Il se déchaîna alors, en hurlant, en faisant tout son possible pour l'attendre : ses yeux étaient rouges, il bavait presque. Je le propulsais contre une colonne et masquais la lame. Il rentra ses griffes, se frotta la tête et se releva en titubant. Le vieux maître était à présent à l'autre bout de la salle.
« Oh, Samina, qu'as-tu fais ? C'était un démon ! Ou un poulet ! Rah, encore une ennemi ! Et tient, meurt ! Kamabounga ! Et mourrez traîtres ! »
L'écaflip semblait avoir complètement perdu la tête. Nous l'allongeâmes sur un tapis, et il se calma.
Il s'assit face à nous, l'air abattu.
« Rien ne trompe ! L'aura rougeâtre de tes griffes, ton regard, ta… ta "perte de contrôle"… Mais dis-moi, cette épée, puis la voir ? »
Je coulais un regard vers Iruku, qui acquiesça très légèrement de la tête. Je tendis l'épée au vieux Maître, qui la contempla.
« Vous les entendez, vous aussi ..? Ah, elles elles vous entendent… Elles vous observent… Elles veulent le passage pour notre monde… Oui, par le sang… Uh, vous les entendez n'est-ce pas ? »
J'eu beau essayer d'entendre quelque chose, mais à part quelques rires gras émanants de la salle d'à côté, rien. Iruku paraissait arrivé à la même conclusion, lorsqu'il cessa soudain de bouger. Une onde parcouru son corps et il frissonna.
« Oui Maître, je les entends.
- Elles veulent que tu prennes le sabre… elles t'appellent… Elles appellent la descendance du Démon… Oui, car lorsqu'Il vint dans notre monde, Il avait l'apparence d'un disciple… Il a laissé plus que des ruines, Il a laissé Son sang… Le descendant du démon, Iruku, le descendant de… Rushu !
Si à ce moment là, un coup de tonnerre avait retentit, je crois que j'aurai sursauté. Mais rien ne se passa. Iruku tremblait. Je posais une main sur son épaule et récupérais le sabre.
« Et donc ? Que faut-il faire ?
- Uh… Là n'est pas la question… Que veut-il faire ?
- Je veux… il déglutit avec difficulté. Je veux être libre de l'emprise de qui que se soit ! dit-il d'une voix forte.
- Uh… Un vieux sage, dans la citée de Brakmar saurai sûrement s'y prendre…
- Un genre d'exorciste ?
- Oui, uh, il saura ce qu'il faut faire. J'espère.
- Eh bien, nous partiront dès demain ! déclara Iruku.
- Uh uh… Oui… Mais tu sais que renier ses origines, c'est mal ?
Le jeune écaflip se leva.
- Mes origines sont le Mal.
Nous quittâmes le vieux Maître après l'avoir beaucoup remercié. Iruku alla méditer dans la chambre qu'on lui avait offerte pour la nuit. J'allais payer la mienne lorsqu'Amiya revint et me dit que j'allais pouvoir tenir ma promesse, et me demanda de la suivre dans sa chambre. J'acceptais.
Nous partîmes le lendemain, avec pour direction Brakmar, la Cité Sombre !
Chapitre XI (Iruku)« Rahh, Brakmar, comme si j'avais que ça à faire que d'aller à l'autre bout du monde ! » Ragea Spiks encore à moitié saoul de la veille.
Au matin, il était sortit de la chambre discrètement, les vêtements froissés, épuisé.
Le Sram avait refermé la porte et s'y était adossé.
Je l'attendais en silence.
Soudain, une jeune Ecaflipette à moitié nue avait entrouvert la porte d'où il venait de sortir.
Celui-ci prit ses fémurs à son cou et détala à toute vitesse en direction de la sortie sous les cris de la disciple.
Après une heure de route, nous décidâmes de nous arrêter pour faire une pause.
J'allais me reposer à l'ombre d'un arbre pour manger le bout de pain que Spiks venait de me fournir.
Il attacha sa monture et vint me rejoindre.
L'endroit était sympathique, les montagnes se dressaient derrière nous, les pious gambadaient sur l'herbe fraîche en émettant de petits piaillements joyeux.
« Alors, t'as passé une bonne nuit ? Lui demandais-je avec un sourire malicieux.
- Mhm, t'es... trop jeune...
- Aller raconte !
- Bon... Cette fille est une vraie tigresse ! Elle ne s'arrête jamais ! Jamais… euh… rassasiée ! J'ai bien cru que j'allais être à court de... Euh... de moyens pour m'échapper ! M'affirma-t-il, soudain tout mal à l'aise.
- Ah ouais, la classe ! »
Je levais la tête au ciel, le soleil y était haut maintenant.
Je distinguais des ombres au loin se dirigeant vers nous.
Après quelques minutes elles furent à quelques mètres du Sram et de moi.
Ils étaient trois encapuchonnés dans de longs manteaux noirs.
Je donnais un coup de coude à Spiks qui essayais de dormir un peu, et lui montrai du pouce les trois étrangers.
« Vous désirez … ? » demandais-je lorsqu'ils arrivèrent à notre hauteur. Il ne me prêtèrent aucune attention.
« Toi le Sram, comment te nommes-tu ?
- Spiks.
- Es-tu au courant que tu te trouves sur les terres des Sacrieurs et que tu en à été banni ?
- Oui. »
L'homme qui s'était adressé leva soudain sa lance en direction du Sram.
C'était une arme magnifiquement taillée, avec une pointe en acier. Rien qu'en la regardant, on la savait meurtrière.
« Je te donne dix secondes pour déguerpir.
- Tu ne réussiras pas à me faire partir de force.
- Pauvre fou ! »
L'homme enleva sa cape révélant un uniforme de garde du Temple de Sacrieur jeta sa lance sur Spiks.
Ce dernier n'avait pas bougé, la lance avait traversé son corps de part en part pour venir s'encastrer dans le rocher contre lequel le Sram était adossé.
Je restais bouche-bée.
Spiks ne bougeait plus, sa capuche bleu masquait son visage.
Sa main se leva pour aller se glisser sous sa tunique.
Un coup sec suivit d'un craquement retentit.
Le garde retira sa lance, elle était cassée au niveau de la pointe.
Le Sram se releva lentement, lâcha le bout de la lance qu'il tenait dans la main et sortit ses dagues.
« Prépare toi à combattre ! » me glissa-t-il.
Je me plaçais à son côté, prêt à bondir.
Le garde rageais en face de Spiks, mais je constatais que ses deux compagnons restaient derrière lui, sans bouger.
Le garde avait sortit une épée et entra en combat contre Spiks. Celui ci esquiva le premier assaut, un deuxième, et attaqua.
La lame fendit l'air, plus rapide que la lumière.
Un choc, métallique.
Une jeune Sramette se tenait en face de Spiks, elle avait contré l'assaut.
La dernière personne enleva sa cape révélant ainsi le doux visage d'une belle Sacrieuse.
Spiks recula, maintenant sa garde.
« S... Syria, Kihra ?! »
Je me rapprochais.
« C'est qui eux… ?
- Des connaissances… Me répondit le Sram, hésitant. Elles étaient là lors de la mort de ton père.
- Spiks, je t'ai bannie, tu n'es plus autorisé à rôder sur nos terres. Lança Syria.
- Comme je l'ai déjà dis, personne ne peut m'enlever ma liberté.
- Alors tu mourras libre ! »
La jeune Sramette du nom de Kihra engagea le combat. En même temps, Syria fonçait aider son amie.
Kihra sortit ses dagues et tenta un coup de pied sur le côté gauche du Sram, qui esquiva en roulant au sol.
Sa dague fouetta l'air mais la sramette avait déjà disparut dans un lourd manteau de brume.
Spiks fut soudainement projeté à terre, il se releva tant bien que mal pour recevoir un coup de genoux dans la mâchoire ce qui l'envoya valser contre un rocher.
Un sentiment de peur m'envahit, C'était la première fois que je voyais un combat comme celui ci ! Les attaques s'enchaînaient, fulgurantes, aussi bien au corps à corps que magiques. Spiks se battait contre deux adversaires qui l'attaquaient de tous les côtés.
La Sramette enchaînait coup sur coup, qu'il parait ou esquivait. Mais il n'attaquait pas.
Je devais intervenir.
Je fis appel à mes sens aiguisés. Elle se rendit invisible. Un craquement sur l'herbe sèche, une ondulation dans l'air : je la sentais.
Kihra était juste dans le dos de Spiks, dagues en mains.
« Elle va l'achever ! » Me dis-je.
La jeune Sramette abaissa ses mains dans un arc de cercle meurtrier.
Spiks tourna la tête, dans l'attente du coup qui le terrasserait pour de bon.
Je crus voir une larme couler le long de son visage, mais les Srams ne pleurent pas.
Un bruit, un seul.
Celui du carton se déchirant.
La lame se ficha dans la carte géante que je venais de faire apparaître.
Un As de pique.
Signe du destin ?
Spiks rouvrit les yeux et se retourna.
La carte disparut, je me trouvais maintenant à sa place.
La Sramette leva la tête vers moi, son voile d'invisibilité s'évaporant.
Son regard d'émeraude était plongé dans le gris de mes yeux.
Un déclic parut survenir dans l'esprit de Kihra.
« Sola... Solamar ?
- Non, son fils. » répondis-je.
Le visage de la Sramette s'emplit de tristesse.
« Tu as les mêmes yeux que ton père. » Me dit-elle. Puis elle s'effondra en pleurs.
Spiks se relevait, hésitant, face à Syria.
Pourquoi es-tu avec Spiks ? Me demanda Kihra ?
- Il m'a sauvé la vie, et m'a donné l'héritage de mon père.
- L'héritage de ton père ?
- Son sabre. Expliqua le sram.
- Solamar avait donc un fils…
- En effet. Et nous nous rendons à Brakmar. Si vous devez tuer Spiks, autant me tuer aussi, car je le défendrai.
Le disciple de sram eu l'air gêné par cette déclaration.
- Ce ne sera pas nécessaire, dis Kihra. Spiks ? Je te pardonne, tu es désormais re-autorisé à te déplacer sur les terres des Sacrieurs, et tu seras le bienvenu au Temple.
- Je... Je te remercie. »
Kihra le serra dans ses bras, en sanglotant. Jamais je n'avais vu mon nouvel ami aussi hésitant et gêné qu'aujourd'hui.
Elle vint à moi, me regarda une dernière fois dans les yeux, et m'embrassa sur la joue.
Elle recula, rabattant sa capuche.
« Nous devons partir à présent, nous vous souhaitons bonne route, et bon courage ! Lança Syria. Kihra, vient ! Toi aussi Losdan, ordonna-t-elle au garde, complètement dépassé par les événements et que j'avais oublié.
La jeune Sramette s'empressa de retirer sa main de la poche du Sram, un sourire énigmatique aux lèvres.
Les deux groupes se séparèrent et continuèrent leur route chacun de leur côté.
Nous chevauchions en direction du village.
Le Soleil se couchait sur cette belle journée d'hiver.
« Que dirais-tu de dormir à l'auberge ce soir ? Proposa Spiks, regardant le ciel.
- Ouais ! On va enfin dormir dans un vrai lit ! Et je veux boire de la bière !
- Tout ce que tu voudras. » Me répondit-il en rigolant.
Nous arrivâmes au village, il faisait nuit, les marchands étaient en train de ranger leurs étales et de compter leur recette pendant que les aventuriers se dirigeaient vers la taverne pour raconter leurs divers histoires et périples dans ce monde remplit de danger.
Nous trouvâmes une auberge un peu à l'écart du bourg.
Nous entrâmes.
Une chaleur douillette sortait de l'immense cheminée placé sur l'un des côtés de la salle.
Spiks s'approcha du bar et prit une chambre pour la nuit.
Nous montâmes l'escalier et entrâmes dans la chambre.
Je me jetais sur le lit en une magnifique pirouette tandis que Spiks s’allongeait tranquillement.
« Je suis exténué, je ne vais pas traîner à dormir. M'expliqua-t-il.
- Mouais, bah bonne nuit. »
Je retournais mon coussin et y posais ma tête.
Nous nous endormîmes bercés par les sifflements du vent qui, à l'extérieur, balayait le village par ses bourrasques.
Chapitre XII (Spiks)Je m'éveillais en sursaut, saisissant mes dagues. La pièce était vide, calme, silencieuse.
Trop vide. Iruku avait disparut., la fenêtre était ouverte. Mes os se glacèrent : où était-il ? pourquoi disparaître ? avait-il été emmené de force ?
J'allais à la fenêtre, sautais sur l'arbre en face, et l'escaladais. Je fus soulagé de voir Iruku sur le toit, immobile.
D'un bond souple, je le rejoignais silencieusement.
« Hey ! Qu'est-ce que tu fais là ?
- Ah c'est toi ! Rien… J'arrivais pas à dormir.
- Pourquoi ?
- Je crois… Ma partie démon refuse d'aller à Brakmar… Elle veut que je fuis…
- Et toi ? Ta partie toi ?
Il hésita.
- Je veux aller à Brakmar.
- Ah ! »
Nous restâmes quelques temps en silence, observant le village endormis.
Il parla :
« Spiks ?
- Hmm ?
- Après… tout ça, tu vas faire quoi ?
- Je ne sais pas…
- Tu vas retrouver l'écaflipette ?
- Il y a plus de chance que ce soit elle qui me retrouve… Et toi ?
- Je pense… Que je vais m'engager dans les rangs de Brakmar.
- Oh… Avant ça faudra que tu ailles voir Bonta, en homme libre, au moins un fois !
- Tu crois que ça marchera, l'exorcisme ? »
Je me tournais vers lui.
« Je ne sais pas, mais je pense que tu ferais mieux d'aller dormir. »
Et nous retournâmes nous coucher.
C'est malin tiens, maintenant je vais pas réussir à dormir, avec ses questions sur les projets d'avenir… Et puis, je vais quand même pas l'abandonner à lui même, à Brakmar, et sans expérience ! Il tiendrai pas une semaine ! Peut être que je devrai l'entraîner… J'y connais pas grand choses aux techniques écaflip. Pour le combat en tout cas. Bah, au moins, à l'arme blanche, je pourrai l'aider !
Je me tournais vers lui. Il dormait déjà, roulé en boule dans ses couvertures. Il ne ressemblait pas tellement à son père… En même temps, il devait avoir hérité de sa mère… Qui était-elle ? Le vieux Maître avait dit Sama… Samina, voilà. Et donc elle est morte ? Peut être qu'il a encore de la famille chez les écaflips, remarque…
Je me rendis soudain compte que je n'était pas beaucoup plus vieux qu'Iruku, et donc que Solamar devait être plus vieux que je ne le croyais… Tellement de questions sans réponses… Quand tout sera finit, je ferai des recherches. Je dois savoir qui ils étaient, tous…
Je me retournais dans mon lit, et finit par sombrer dans le sommeil.
Le lendemain, j'étalais une carte du Monde connu sur un table, et posais mes dagues de chaque côtés afin de la garder à plat. Iruku, qui venait d'émerger d'un sommeil de plomb, me regarda d'un air interrogateur.
« Eh oui, j'ai une carte, et on va en avoir besoin pour notre route ! Voilà l'itinéraire que je suggère : Pour éviter de voyager durant des jours dans les Landes de Sidimotes sans rien à manger, aux milieu de geysers de souffre et de monstres affamés, nous allons prendre directement un bateau à Madrestam qui va au Sud, vers Sufokia. C'est long, mais en dehors des bandits, c'est plus sûr. Après, soit nous traverserons la plaine des scarafeuilles, vers le Village des dragoeufs, et nous arriverons de l'autre côté du Cimetière des Torturés, que nous contournerons, pour arriver à Brakmar, par l'Est. »
Je levais la tête, et la figure épouvantée d'Iruku me fis sourire.
« Il n'y a pas un autre moyen ? me demanda-t-il.
- Eh bien, si t'es pas pressé, on peut traverser le monde à pied. Mais c'est pire.
- Va pour ton bateau. »
Madrestam est un des plus grands port du monde des 12, même s'il ne rivalise pas avec Sufokia. Il est très bien placé pour faire navette entre le continent et Pandala, l'Île des Wabbit ou même l'île de Moon. Il y a également un intense lien commercial entre Madrestam et Sufokia, la distance à parcourir étant plus rapidement franchie que par la terre, et bien plus sûre.
Il ne fut pas difficile de trouver un bateau en partance pour Madrestam, mais pour pouvoir monter, ce fut une autre paire de manches. Les navires n'emportaient que des marchandises, afin de rentabiliser un maximum le voyage, et il n'y avait pas de place pour "des passagers inutiles".
Nous finîmes par trouver enfin un bateau, sur le point de partir. Il fallut payer le capitaine, mais c'était un marché honnête. Nous embarquâmes donc pour Sufokia.
Le voyage fut long et ennuyeux, surtout pour Iruku, qui ne tenais pas en place. Je décidais de mettre le temps à profit pour l'entraîner au combat. Je demandais un sabre au capitaine et nos commençâmes l'entraînement, sous les regards des matelots.
Très agile, Iruku esquivait bien les coups, mais sa faiblesse était qu'il n'attaquait pas, ou alors ses attaques étaient prévisibles et donc plus dangereuses pour lui que pour son adversaire.
À la fin du voyage, il maniait bien le sabre, et avait fait des progrès étonnants : il ne serait désormais plus en danger constant.
Nous arrivâmes à Sufokia et louâmes une chambre dans une auberge.
Dès le lendemain, nous étions en route pour Brakmar.
Chapitre XIII (Iruku)Deux jours que nous voyagions à dos de dragodindes à travers le monde pour rejoindre la cité maléfique qui dessinait des nuages sombres au loin. Deux jours que nous traversions les plaines des scarafeuilles. Ici, il y a deux problèmes. Soit les scarafeuilles vous attaquent et il faut donc se battre régulièrement, soit il ne passe rien, et ce sous une chaleur écrasante, qui rend ennuyeuse et épuisante tout voyage dans cette contrée. Nous étions dans le deuxième cas.
Nous arrivâmes près d'une petite ferme, quelques paysans fauchaient le blé à la sueur de leur front pendant que les scarafeuilles gambadaient dans la prairie (si, si).
Spiks rapprocha sa monture de la mienne -que j'avais acheté au marché de Sufokia, une belle bête, rôdé pour les longs voyages- et prit une longue inspiration.
« Demain, nous atteindrons la presqu'île des dragoeufs. Il ne faudra pas y trainer plus de deux jours, le danger serait alors trop grand.
- Ils sont si terribles que ça ?
- Lors d'une de mes mission pour Bonta, j'ai eus à la traverser avec mon équipe, je n'y suis plus jamais retourné.
- Pourquoi ?
- Toute mon escouade à été decimée, je suis le seul survivant.»
Un silence glacial s'installa.
« Comment t'en-es tu sortit ?
- Eh bien… je devais être le seul à pas avoir un intérêt culinaire ! »
Je jetais un regard derrière moi.
« On dirait qu'une tempête se prépare.
- Oui, raison de plus pour se dépêcher. Le chemin risque de devenir impraticable. »
Spiks éperonna sa monture et partit au galop vers l'Ouest. Je fis de même sans me laisser distancer par le sram.
Nous fîmes quelques kilomètres puis demandâmes à une famille de paysans de nous héberger pour une nuit ce qu'ils acceptèrent avec enthousiasme. La soirée se transforma rapidement en petite fête car, les visiteurs étaient rares en ces plaines.
Nous repartîmes au petit matin après avoir remercié la famille qui nous avait fournit quelques vivres pour notre voyage.
Nos montures peinaient à avancer car les récentes pluies avaient rendues le sol boueux ce qui ralentissait notre progression. Les nuages gris au dessus de nos têtes prenaient des formes sinistres tandis qu'un vent incessant balayait les plaines nous donnant du fil à retordre.
Nous atteignîmes un pont à moitié écroulé. Une planche reposait sur le sol. Je la ramassai, et soufflai sur la poussière qui la recouvrait.
'Amakna'
« Qu'est ce que c'est ? Demandais-je crédule.
- C'est l'ancien village d'Amakna, aujourd'hui la presqu'île des dragoeufs.
- ...
- Maintenant, restes sur tes gardes, le danger, ici, est mortel. »
Je sortis mon sabre de son fourreaux. Une fine lame d'argent au fil acéré, une arme de précision.
Nous franchîmes le pont avec prudence. Le village apparut alors, dévasté.
Il y avait en effet une ressemblance avec la contrée d'Amakna mais une aura maléfique rôdait en ces lieux, un fardeau inconnu qui vous pèse sur les épaules, vous assombrit l'esprit, vous donne des idées noirs... Un lieu chargé de souvenirs cruels.
Le village était étrangement calme, aucun bruit ne s'entendait, pas même le chant des oiseaux.
« Ne trainons pas, cet endroit me file la chair de poule. » Lançais-je
Nous reprîmes la route à l'affut du moindre bruit suspect. Une fine pluie s'installa alors.
Après deux heures passées sur nos montures, un éclair surgit dans le ciel, suivit d'énormes gerbes d'eau. La tempette recommençait.
Nous décidâmes d'aller nous réfugier dans une grotte pas très loin de là.
« Quel temps de mulou ! S'écria Spiks d'un ton rageux.
- Ne t'inquiète pas, au moins, nous sommes à l'abrit ici. »
Un long grondement surgit du fond de la grotte.
Spiks se pétrifia, je lisais dans ces orbites une grande inquiétude.
Un deuxième grondement retentit, plus proche.
Je me retournais lentement vers le fond de la grotte dans laquelle nous nous reposions. Je n'arrivais pas à distinguer quoi que ce soit dans la pénombre. Une lumière rougeâtre apparut alors, faible. Elle s'épaissit soudain pour se transformer en jet de flammes ardentes se dirigeant droit vers nous. Nous nous couchâmes au sol. Une créature surgit de l'ombre. Elle était imposante, mesurant bien deux mètres de haut pour autant de large. Enfermée dans une sorte de coquille noir, des yeux rougeâtres reposaient sur une gueule d'où se déchainait l'enfer.
« Un dragoeuf ! On décampe ! » Hurla le Sram, un éclair de panique dans les yeux.
Soudain, le monstre se jeta sur moi me projetant contre une des parois rocheuses, je perdis connaissance. Spiks se retourna à regret et se mit en position de combat, sortant ses dagues.
Un voile recouvrit le corps du Sram qui disparut dans l'ombre. La créature révéla alors d'énormes griffes acérés. Celle-ci reçut deux entailles profondes sur les cuisses ainsi qu'une autre sur le torse. Soudain, il fut repoussé dans un coin de la pièce, et le sol explosa sous ses pattes, le tuant sur le coup. Le piège de Spiks avait fonctionné, mais le bruit du combat attirai de plus en plus de ces créatures. Deux dragoeufs moururent en jaillissant du fond de la grotte, marchant sur des pièges, et deux autres encore sous les attaques de Spiks. Soudain, un des dragoeuf se retourna aussi vif qu'un éclair et saisit quelque chose, le voile d'invisibilité disparut révélant Spiks. Ce dernier essaya d'esquiver le coup, mais fut atteint et projeté sur le sol, le souffle coupé. Un des dragoeuf, plus grand que les autres, l'attrapa entre ses griffes, avec la ferme intention de goûter la moelle du disciple.
Le Sram réussit à se dégager évitant de justesse un jet de flammes qui l'aurait cueillit de plein fouet. En se dégageant, son sac se déchira faisant tomber son matériel. Un sabre à la lame rougeâtre en sortit et vint se ficher dans le sol rocheux. Je me relevais, soudain guérit, une lueur démoniaque dans le regard. Spiks me regarda. Il savait ce qu'il se passait et il n'interviendrait pas car c'était notre seule chance de nous sortir vivant des flots de dragoeufs qui se jetaient sur nous à travers leur trou. Je me relevais et saisis le sabre à toute vitesse, l'arrachant du bloc de roche dans lequel il s'était planté. Une aura noir m'enveloppa alors.
Un dragoeuf se désintéressa du Sram pour focaliser son attention (et son appétit) sur moi. D'énormes griffes sortirent de mes phalanges, deux cornes recourbées poussèrent sur mon front tandis que mon corps gonflait. Un rugissement terrible sortit de ma gueule, je fonçais vers la créature à toute vitesse. J'abatis le sabre sur son épaule qui s'enfonça dans sa chair comme dans du beurre. La plaie béante s'enflamma soudain arrachant des cris de douleur au dragoeuf. Je levais la lame au dessus de mon crâne et l'abaissai avec toute la force que je possédais. La créature se fendit en deux parties distinctes pour s'écrouler par terre. Les restes su monstres s'enflammèrent. Le combat dura encore quelques instants, mais l'instinct des créatures les forçaient au repli, et elles disparurent.
Spiks se releva. Il m'observa longuement d'un regard de glace. Puis se retourna vers la sortie et s'en alla en marchant tranquillement. Mon corps devint incontrôlable. Je courais dans sa direction, le sabre à la main. Le sram disparut soudainement. Je m'arrêtais. Mon sabre s'envola pour aller s'écraser contre une paroi. Spiks réapparut, juste devant moi. Un seul problème persistait. Je n'était pas redevenu normal. Une rage intense m'envahit, et je me jetais sur lui. Il ne s'attendais pas à une telle attaque. Un coup du revers de ma main l'ennoyage contre un mur. Il s'écroula et ne bougea plus. Sous le choc, la pierre s'était brisé, comme certaines vertèbres du sram.
Je m'écroulais à mon tour, et regardais autour de moi. C'est à ce moment là que je découvris la dague plantée dans mon thorax.
Une lumière intense me réveilla, je me levais avec un mal de crâne que seul un fêtard du nouvel an pouvait comprendre, après une soirée à la Bagrutte. Je fis le tour de la pièce dans laquelle je me trouvais. Un autel de pierre reposait en son centre, des bougies étaient disposées sur divers étagères. J'ouvris la seule porte que j'arrivais à distinguer, elle s'ouvrit sur un couloir suivit d'un escalier que je descendis avec peine. J'atterris au rez-de-chaussé, le plafond était à moitié écroulé, un tas de briques reposait au centre du séjour. Je poussais la porte d'entrée. Je crus d'abord qu'il faisait nuit mais non, le ciel enfumé des landes de Sidimotes ne laissait pas passer un brin de lumière. Je regardais autours de moi. Les ruines d'un village.
Un homme sortit d'une maison éventrée, et, quand il me vit, se dirigea vers moi.
Il portait un long manteau noir orné de fourrure tout aussi sombre. Lorsqu'il n'y eut plus que quelques mètres entre nous, il enleva sa capuche révélant ainsi les traits d'un Osamodas. Un petit tofu sortit de sa poche pour venir se loger sur son épaule.
« Salutation jeune écaflip, suis moi. »
Sa voix était calme et glaciale. Je le suivis dans la bâtisse d'où il était apparut. L'homme m'emmena dans une salle identique à celle dans laquelle je m'étais réveillé. Spiks était à moitié allongé sur au pied de pierre froide. Des os brisés étaient disposés un peu partout autour de lui. L'osamodas cherchait apparemment à reconstruire le puzzle de son corps, sans grand succès.
« Je m'appelle Kryzma, disciple du dieu créateur, dit-il soudain.
- M... moi c'est Iruku, qu'est ce que nous faisons là ? Pourquoi il est là, dans cet état ?
- Je n'en sais rien, je vous ai trouvés tout les deux, en mauvaise forme, dans une grotte avec des carcasses de dragoeufs, sur leur île pendant que je la traversais.
- Il est m… Mort ...?
- Je n'en sais pas plus que toi, ton ami nous révélera ce qui s'est passé. »
Une lumière rouge sortit des mains de l'invocateur, le sram trembla, grogna, et la flamme bleue de ses orbites se ralluma. Spiks se réveilla lentement, une main sur le crâne.
« Halut ha homhahie, huis au hahahis…? Lança t-il.»
Il s'arrêta d'essayer de parler, et tendis la main vers son sac. Je lui donnai. Après avoir fouillé un peu, il en sortit une mâchoire et la mis en place dans un claquement.
« Je disais donc, "Salut la compagnie, je suis au Paradis ?"
- Non tu es chez moi, dans ma maison.»
Le Sram se hissa soudain sur ses coudes, et regarda l'osamodas avec un air étonné.
- Cette voix... Elle me dit quelque chose.
L'Osamodas resta de marbre.
- Quel est ton nom ?
- Kryzma, ancien soldat Bontarien.
- Qu...Que, c'est... Impossible ?! Je te croyais mort !
L'homme fronça les sourcils puis son visage s'éclaircit.
- Spiks ! Mais comment ne t'ai je pas reconnu ! Comment ça va depuis tout ce temps ?
- Comme un Sram qui vient de mourir !
Les deux hommes éclatèrent d'un rire commun.
- C'est moi où je suis le seul à rien comprendre ...? Lançais-je.
- Ah.. Désolé Iruku, déclara Spiks tandis qu'il fouillait dans son sac et remplaçait ses vertèbres et côtes brisées, j'te présente un ami, Kryzma. Il faisait partit de l'escouade qui à périt pendant la traversée de la presqu'île. Mais il à réussi à s'en sortir apparemment, hein petit veinard ! »
Kryzma sourit.
Nous passâmes une partie de la nuit à écoutez les histoires fabuleuses du jeune Osamodas, puis allâmes nous coucher.
Au lendemain, nous chargeâmes les montures sous le regard de Kryzma.
« Mon ami, souhaites-tu te joindre à nous ? Demanda Spiks hésitant.
- Je ne sais pas, j'ai formé ma propre famille de mon côté, elle m'attend avec impatience à Bonta...
- Je comprend... Et bien, je te souhaite bon courage pour la suite. Sache que je suis heureux de te savoir en vie.»
Sur un dernier coup d'oeil, nous enfourchâmes nos montures et quittâmes les ruines de Gisgoul pour nous diriger vers le Sud où nous longerons le cimetière des torturés pour atteindre Brakmar par la porte Est.
Le jeune Osamodas, lui, sauta sur sa propre monture et disparu avec pour direction le Nord.
Nous traversâmes pendant quelques heures au péril de nos vies les geysers de lave des landes de Sidimotes pour enfin réussir à gagner la bordure du cimetière.
L'endroit y était sombre, l'éclairage rougeoyant de la cité ne parvenait plus jusqu'ici. Il y faisait froid, très froid. Une épaisse brume s'engageait doucement entre les portailles rouillées pour se faufiler à l'intérieur des tombes ouvertes et se glisser dans les petites batisses qui renfermaient surement d'immondes créatures. Un endroit innhospitalier.
« Continuons notre route.» Lançais-je, inutilement car Spiks faisait déjà accélérer sa monture.
Nous fîmes avancer au pas nos montures comme si un tel endroit imposait un silence macabre.
Nous avançâmes pendant une trentaine de minutes, le temps d'observer les alentours.
Soudain, un bruit, métalique,se répétant sans cèsse en échos, se répercutant à travers la brume, s'infiltrant dans les batisses, dans les différentes tombes, le bruit d'une dragodinde trébuchant sur une barre de fer provenant probablement d'un portaille brisé. Un long soufflement parvint jusqu'à nos oreilles, comme une sorte de respiration continue, nous nous arretâmes, pétrifiés.
Le souffle disparut, laissant place à d'innombrables discutions provenant de partout à la fois.
« ... Des visiteurs ...?
- Commestibles ...?
- Ca fait des décénies que j'ai pas mangé !
- Je sens le festin approcher...
- On sort ?
- J'ai faim ! »
Sur cette dernière tirade, des spectres sortirent des batisses, émergèrent des tombes, sortirent des corps suspendus aux potences, et fonçèrent droit sur nous.
« Des fantômes ! »
Nous épperonnâmes nos montures et partîmes en un éclair à travers la brume, traversant le cimetière à l'aveuglette, vrai labyrinthe de l'horreur, poursuivis par les spectres. Soudain, un vieil homme en robe blanche apparut et se plaça face aux fantômes.
« Arrière, créatures maléfiques ! Retournez dans vos tombes !
Nous nous arrêtâmes.
Les fantômes eurent l'air d'hésiter, puis se jetèrent sur le vieux en hurlant.
Nous ordonnâmes à nos montures de partir au galop.
Après une demi-heure, la brume se dissipa, laissant apparaître devant nous la sortie du cimetière, dans un dernière effort, nous poussâmes nos montures et réussîmes à atteindre la frontière. Je jetais un regard en arrière, les fantômes rejoignèrent leur tombe, non sans raler de ne pas avoir pu manger aujourd'hui. Je me redressais, la cité apparut devant mes yeux, imposantes par ses murailles de plus de quarante mètres de haut.
La porte se dessinait juste devant nous, courônnée de grille noires acérées.
Nous nous y engageâmes.